Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/101

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méritoit, et c’étoit moins une seconde passion qu’un remède à la première. Il ne faisoit pas beaucoup de chemin ; tout ce qu’il pouvoit faire étoit d’émouvoir la comtesse et de mettre au desespoir le chevalier, et pour cela il s’en tenoit aux regards et aux assiduités, sans se soucier d’aller plus vite. La comtesse, qui, à ce qu’on croit, n’avoit jamais eu le cœur touché que du mérite de Guitaud[1], favori du prince de Condé,

    Louis-Thomas de Savoie, comte de Soissons. Chassée à cause de lui par Monsieur, elle l’épousa le 12 octobre 1680. Encore un mariage qui déplut aux rigoristes ; il ne put être reconnu que le 27 février 1683.

    Madame, peu coutumière du fait, a donné à cette troisième demoiselle de Beauvais un certificat de vertu (lettre du 19 fév. 1720) : « J’avois une fille d’honneur nommée Beauvais ; c’étoit une fort honnête créature. Le roi en devint amoureux, mais elle tint bon. Alors il se tourna vers sa compagne, la Fontange. »

  1. « Le petit Guitaut », comme on disoit ; Guillaume de Peichpeyrou (ou Puypeyroux. Tall. des R., t. 1, p. 112) de son nom. Il étoit fils du vieux Guitaut, capitaine des gardes de la reine-mère, et cousin de Comminges, des gardes du roi (Mottev., t. 3, p. 446). De bonne heure il s’étoit attaché à Condé. Il est blessé en Guienne à son service en 1650 (Pierre Coste, p. 49) ; il lui est très utile durant sa captivité (Montp., t. 2, p. 123) ; il est blessé à côté de lui au combat de Saint-Antoine (Quincy, t. 1, p. 158 ; Montp., t. 2, p. 261). Il suivit sa fortune, c’est-à-dire ne rentra en grâce que tardivement et sans grande chance de fortune. Mais son mariage avec Jeanne de La Grange lui donna le marquisat d’Espoisses, en Nivernois.

    Nous avons vu quelle part Guitaut a eue dans les malheurs de Bussy. Il ne le servit guère auprès de Condé ; il fit le fier, long-temps après, pour signer un traité de paix solide. Cependant il aimoit madame de Sévigné, dont il étoit le voisin à Paris (se rappeler la lettre de l’incendie, en février 1671), et qui alloit souvent le visiter dans sa terre de marquis. « C’est un homme aimable et d’une bonne compagnie, disoit-elle (22 août 1676) ; sa maison est gaie, parée, pleine de fêtes ; on y revoit