Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/260

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dans Paris, où il avoit des commerces avec elle pour les intérêts de monsieur le Prince ; il mit tant de gens en quête de Ricoux qu’il fut pris et mené à la Bastille. L’abbé Foucquet l’ayant fait

    laissast en liberté, il faudroit doubler qu’il eust esté gagné contre moi, et il seroit plus à craindre en cela qu’un autre. »

    C’est ici le lieu de transcrire un long passage des Mémoires de Mademoiselle (t. 3, p. 411) ; il est d’une grande valeur pour nous. Elle le date de 1659, mais la date ne sauroit être toujours admise sans réserve dans ces mémoires. « Madame d’Olonne alloit en masque tous les jours avec Marsillac, le marquis de Sillery, madame de Salins et Margot Cornuel. Le marquis de Sillery avoit été amoureux de madame d’Olonne ; en ce temps-là il n’étoit que confident. Cette troupe alloit s’habiller chez Gourville ; elle n’osoit le faire chez madame d’Olonne à cause de son mari. Le comte de Guiche continuoit sa belle passion pour elle, et l’abbé Fouquet, qui étoit enragé contre tous les deux, s’avisa de les brouiller et de s’en venger par là. Il obligea le comte de Guiche à demander à madame d’Olonne les lettres de Marsillac lorsqu’il se verroit un moment mieux avec elle ; ce qu’il fit. Elle les lui donna : le comte de Guiche les mit entre les mains de l’abbé Fouquet, qui d’abord les montra à madame de Guéménée, afin qu’elle en parlât au Port-Royal, et que cela allât à M. de Liancourt, pour le dégoûter de lui donner sa petite-fille ; il les montra aussi au maréchal d’Albret, qui alla trouver M. de Liancourt, comme son parent et son ami, pour l’avertir de l’amitié qui étoit entre madame d’Olonne et M. de Marsillac ; et je crois même qu’il avoit pris quelques unes de ces lettres. M. de Liancourt lui dit : « Je m’étonne que vous, qui êtes galant, soyez persuadé que l’on rompe un mariage sur cela. Pour moi, qui l’ai été, j’en estime davantage Marsillac de l’être, et je suis bien aise de voir qu’il écrit si bien. Je doutois qu’il eût tant d’esprit. Je vous assure que cette affaire avancera la sienne. » Je crois que le maréchal d’Albret fut étonné de cette réponse. Les médisants disoient qu’il avoit fait cela autant pour plaire à l’abbé Fouquet que pour donner un bon avis à M. de Liancourt. Véritablement, si l’abbé Fouquet eût pu réussir à rendre ce mauvais office à Marsillac de rompre son mariage, il ne lui en pouvoit pas faire un plus considérable, puisque par là il lui pouvoit faire perdre cinquante