Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/278

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avoit point eu d’intention, et qui ne l’avoit promis à madame de Châtillon que pour en avoir des faveurs et pour arracher du cardinal des grâces qu’il n’en pouvoit avoir sans se faire craindre, supprima la lettre d’intelligence et envoya à monsieur le Prince celle que l’abbé Foucquet avoit fait écrire à madame de Châtillon, par laquelle connoissant qu’elle étoit en danger de sa vie, il lui manda de faire son traité avec la cour, pourvu qu’il tirât madame de Châtillon de prison. Le cardinal, qui croyoit le maréchal tellement amoureux de madame de Châtillon qu’il donneroit tout ce qu’on lui demanderoit pour la mettre en liberté, la lui voulut compter pour cent mille livres, sur les cent mille écus dont il étoit demeuré d’accord avec lui ; mais le maréchal n’en voulut rien faire, et néanmoins, pour ne pas passer auprès d’elle pour un fourbe et garder toujours avec elle des mesures, il ne voulut pas mettre ses places entre les mains du cardinal qu’il ne sût que la duchesse fût en liberté : de sorte que pour le satisfaire là-dessus on le trompa, et on envoya la duchesse chez les Pères de l’Oratoire, se faire voir à un gentilhomme qu’il avoit envoyé exprès pour cela, avec qui elle étoit libre, après quoi elle retourna dans sa prison, où elle fut encore huit jours. Pendant les trois semaines qu’elle fut prisonnière dans la rue de Poitou, l’abbé n’étoit pas si libre qu’elle ; il enrageoit tous les jours de plus en plus : car, comme avec la liberté d’aller et de venir il lui ôtoit encore celle de le tromper, en l’empêchant de voir personne, il la trouvoit mille fois plus aimable qu’auparavant. D’ailleurs, la duchesse, qui vouloit se remettre