Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/34

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ceux qui veulent excuser les femmes qui ont trop d’embonpoint. Cependant celle-ci fut trop sincère en cette rencontre pour laisser les gens dans l’erreur ; elle éclaircit du contraire qui voulut, et il ne tint pas à elle qu’elle ne désabusât tout le monde.

Madame d’Olonne avoit l’esprit vif et plaisant quand elle étoit libre ; elle étoit peu sincère, inégale, étourdie, peu méchante ; elle aimoit les plaisirs jusques à la débauche, et il y avoit de l’emportement dans ses moindres divertissemens. Sa beauté, autant que son bien, quoiqu’il ne fût pas médiocre, obligea d’Olonne[1] à la rechercher en mariage. Cela ne dura pas long-temps : d’Olonne, qui étoit homme de qualité et de grands biens, fut reçu agréablement de madame de la Louppe, et il n’eut pas le loisir de soupirer pour des charmes qui avoient fait deux ans durant tous les souhaits de toute la cour. Ce mariage étant achevé,

  1. Louis de la Trémoille, comte d’Olonne, avoit été arrêté sous la Fronde, en 1649, « comme il se vouloit sauver habillé en laquais » (Retz, p. 100). Il est mort en 1686. Boisrobert s’étoit moqué de lui de bonne heure ; on s’en moqua plus cruellement lorsque sa femme eut rendu publiques ses infortunes. Avec Saint-Evremont et Sablé Bois-Dauphin, il se consoloit en fondant l’ordre des Coteaux, dont Boileau nous a conservé le souvenir. La Bruyère, à ce point de vue, l’a peint sous le nom de Cliton le fin gourmet (t. 2, p. 93). À un autre point de vue, Racine a parlé de lui dans cette jolie épigramme faite sur Andromaque :
    Le vraisemblable est peu dans cette pièce,
    Si l’on en croit et d’Olonne et Créqui :
    Créqui dit que Pyrrhus aime trop sa maîtresse,
    D’Olonne qu’Andromaque aime trop son mari.

    À l’article de la mort, un prêtre nommé Cornouaille lui offre ses services. L’anecdote veut qu’il se soit écrié avec quelque colère : « Serai-je encornaillé jusqu’à la mort ? »