Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/45

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LETTRE.

J’ai bien aimé des fois en ma vie, Madame, mais je n’ai jamais aimé tant que vous. Ce qui me le fait croire, c’est que je n’ai jamais donné à chacune de mes maîtresses plus de cent pistoles[1] pour avoir leurs bonnes grâces, et pour les vôtres j’irais jusques à deux mille[2]. Faites réflexion là-dessus, je vous prie, et songez que l’argent est plus rare que jamais il n’a été.


Quentine[3], femme de chambre et confidente de madame d’Olonne, lui rendit cette lettre de la part de Paget, et incontinent après cette belle lui fit la réponse qui s’ensuit :


LETTRE.

Je m’étois déjà bien aperçue que vous aviez de l’esprit par les conversations que j’ai eues avec vous ; mais je ne savois pas encore que vous écrivissiez si bien que vous faites. Je n’ay rien vu de si joli que votre lettre ; je serai ravie d’en avoir souvent de semblables, et ce pendant je serai bien aise de vous entretenir ce soir à six heures.


Paget ne manqua pas au rendez-vous, et s’y trouva en habit décent, c’est-à-dire avec son sac et ses quilles. Quentine, l’ayant introduit

  1. 3,000 francs d’aujourd’hui.
  2. 60,000 francs.
  3. On conçoit facilement que je n’aie rien trouvé dans les histoires pour me renseigner sur la généalogie de Quentine.