Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/46

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dans le cabinet de sa maîtresse, les laissa seuls. « Voilà, lui dit-il, Madame, lui montrant ce qu’il portoit, ce qui ne se trouve pas tous les jours ; voulez-vous le recevoir ? — Je le veux bien, dit madame d’Olonne ; mais cela nous amusera. » Ayant donc compté les deux mille pistoles dont ils étoient convenus, elle les enferma dans une cassette. Se mettant auprès de lui sur un petit lit de repos, qui ne lui en servit pas long-temps : « Personne, lui dit-elle, Monsieur, n’écrit en France comme vous. Ce que je vous vais dire n’est pas pour faire le bel esprit ; mais il est certain que je trouve peu de gens qui en aient tant que vous. La plupart ne vous disent que des sottises, et, quand ils vous veulent écrire des lettres tendres, ils pensent avoir bien rencontré de nous dire qu’ils nous adorent, qu’ils vont mourir si vous ne les aimez, et que, si vous leur faites cette grâce, ils vous serviront toute leur vie. On a bien affaire de leurs services. — Je suis ravi, dit Paget, que mes lettres vous plaisent. Je ne dirois pas ceci ailleurs, mais à vous, Madame, je ne vous en ferai pas la petite bouche, ni de façon : mes lettres ne me coûtent rien. — Voilà, répondit-elle, ce qui est difficile à croire ; il faut donc que vous ayez un fort grand fonds. » Après quelques autres discours, que l’amour interrompit deux ou trois fois, ils convinrent d’une autre entrevue, et à celle-là d’une autre : de sorte que ces deux mille pistoles valurent à Paget trois rendez-vous.

Mais madame d’Olonne, se voulant prévaloir de l’amour de ce bourgeois et de son bien, le pria, à la quatrième visite, de recommencer à lui écrire de ces billets galans comme celui qu’elle