Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/57

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ceque je ne cherche pas votre justification, et que non seulement vous êtes convaincue à mon égard, mais que je ne puis jamais revenir pour vous.


Le duc de Candale écrivit cette lettre dans le temps qu’il alloit partir pour retourner à la cour ; il venoit de perdre un combat, et cela n’avoit pas peu contribué à l’aigreur de sa lettre : il ne pouvoit souffrir d’être battu partout, et ce lui eût été quelque consolation aux malheurs de la guerre s’il eût été plus heureux en amour. Il commença donc son voyage avec un chagrin épouvantable. En d’autres temps il seroit venu en poste ; mais, comme s’il eût eu quelque pressentiment de sa mauvaise fortune, il venoit le plus lentement du monde. Il commença, par les chemins, de sentir quelque incommodité ; à Vienne, il se trouva fort mal, mais, comme il n’étoit plus qu’à une journée de Lyon, il y voulut aller, sçachant bien qu’il y seroit mieux secouru. Cependant, les fatigues de la campagne l’ayant fort abattu, ses déplaisirs l’achevèrent, et sa jeunesse, avec l’assistance des meilleurs médecins, ne lui put sauver la vie ; mais, comme ses plus grands maux ne lui pouvoient ôter le souvenir de l’infidélité de madame d’Olonne, il lui écrivit cette lettre la veille de sa mort.


LETTRE.

Si je pouvois conserver pour vous de l’estime en mourant, il me fâcheroit fort de mourir ; mais, ne pouvant plus vous estimer, je ne sçaurois avoir de regret à la vie. Je ne l’aimois que pour la passer doucem