Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/95

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il avoit de l’esprit, il savoit beaucoup, il étoit moqueur, léger, présomptueux, brave, étourdi

    sa sœur, Catherine-Charlotte, femme de Louis Grimaldi, duc de Valentinois et prince de Monaco, a fait quelque chose pour gagner cette estime. Non pas sur la fin de sa vie (elle est morte en 1678, à trente-neuf ans, gâtée, dit-on, par un petit coureur de page), mais dans les premiers temps, elle aima ardemment Lauzun, qui n’avoit pas encore fait fortune, et qui étoit son parent. Il est vrai que lorsque Louis XIV la désira elle ne se fit pas désirer long-temps. Lauzun, un jour qu’elle étoit assise sur le gazon avec d’autres dames, lui écrasa la main sous sa botte. Elle dévora cet affront et se tut. Qui décidera quelle épithète il convient de donner à l’action de Lauzun ? Les savants ont quelquefois eu de longues querelles pour régler de moins intéressantes affaires. Mademoiselle de Grammont avoit été l’amie de Madame (Mottev., t. 5, p. 136). Madame de Courcelles (celle-là, ne lui ménageons pas notre mépris et ne lui faisons pas l’honneur de la croire sur parole) a essayé (p. 84 de l’édit. elzév.) de nous la peindre comme une précieuse de profession ; au moins avoue-t-elle qu’elle avoit « beaucoup d’esprit, beaucoup d’amour et de charmes apparents. »

    Je crois que madame de Monaco doit, en somme, trouver grâce devant ses juges.

    Avec ces détours, Guiche est oublié. Il mourut tout à coup, en 1673, à temps peut-être. « Ce pauvre garçon a fait une grande amende honorable de sa vie passée, s’en est repenti, en a demandé pardon publiquement ; il a fait demander pardon à Vardes et lui a mandé mille choses qui pourront peut-être lui être bonnes ; enfin il a fort bien fini la comédie et laissé une riche et heureuse veuve.

    « La comtesse de Guiche fait fort bien ; elle pleure quand on lui conte les honnêtetés et les excuses que son mari lui a faites en mourant ; elle dit : « Il étoit aimable, je l’aurois aimé passionnément s’il m’avoit un peu aimée ; j’ai souffert ses mépris avec douleur, sa mort me touche et me fait pitié ; j’espérois toujours qu’il changeroit de sentiments pour moi. » (Sévigné, du 8 décembre 1673.)

    Il mourut de chagrin à Creutznach (Palatinat), n’ayant que trente-cinq ans. Pour toute oraison funèbre on lui trouve ces lignes : « Ha ! fort, fort bien, nous voici dans les lamentations du comte de Guiche. Hélas ! ma pauvre enfant, nous