Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/182

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toutes deux. Mais dites-moi, tout de bon, avez-vous eu beaucoup d’impatience de me revoir ? Vous y aviez plus d’intérêt que vous ne pensez, car je suis assurément de vos meilleures amies.

« À ces mots elle me tendit sa main en rougissant. Alors je fis tout ce que je pus pour lui bien représenter la grandeur de ma passion, et j’eus le plaisir de voir que je la persuadois. Nous eûmes une conversation de quatre heures, la plus tendre et la plus touchante du monde ; et il me semble que j’avois un esprit nouveau auprès d’elle. Ses beaux yeux, sa douceur, et cent choses favorables et spirituelles, m’animèrent si puissamment à l’entretenir agréablement, qu’elle me témoigna par mille caresses et mille paroles obligeantes qu’elle étoit très-contente de moi. À la fin, après nous être dit que deux amans ne pouvoient pas être plus contens l’un de l’autre que nous ne l’étions, nous prîmes des mesures pour ma conduite. Elle me dit de lier amitié plus étroite avec de Vardes que je n’avois fait jusque alors, et d’aller deux ou trois fois la semaine chez la comtesse de Soissons ; qu’on y feroit des parties entre peu de personnes pour se divertir, et que là nous aurions le temps plus commode qu’au Palais Royal pour ménager nos entretiens particuliers, et sans le ministère de personne que de Montalais, en qui elle se confioit absolument. Et après cela je sortis ; et Montalais, qui étoit demeurée dans un cabinet, me vint conduire jusqu’au petit escalier, où je la remerciai de tous ses soins.

« Depuis ce temps-là j’ai vu de Vardes chez la comtesse de Soissons, où je trouve infailliblement Madame, quand elle n’est pas au Louvre ou