Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/221

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Oui, Mademoiselle, poursuivit-il, j’ai un désir, mais un désir que je ne puis exprimer, de vous voir maîtresse de tout l’univers, et si j’étois assez heureux pour y pouvoir contribuer quelque chose [1], ma vie seroit le moindre don que je voudrois pouvoir faire pour cela, tant il est vrai, Mademoiselle, que je veux désormais m’attacher aux intérêts de Votre Altesse Royale. — Ah ! monsieur de Lauzun, répondit Mademoiselle, vous êtes trop généreux, et vous me comblez de civilités. Je souhoiterois être en état de vous témoigner ma reconnoissance ; mais comme mes sentiments sont hors du commun et très-rares dans le siècle où nous sommes, il faudroit être quelque chose de plus que je ne suis pour pouvoir dignement les reconnoître. Souvenez-vous au moins que je conserverai toute ma vie le souvenir de vos bons et généreux souhaits. — Ce n’est pas, dit M. de Lauzun, une reconnoissance intéressée du côté des biens de la fortune qui me fait parler ainsi, Mademoiselle ; votre royale personne en est le seul motif, et la cause m’en paroît si glorieuse et si juste que je serai toujours prêt à toutes sortes d’événements pour tenir ma parole. — Mais, monsieur de Lauzun, reprit Mademoiselle, que voulez-vous que je fasse pour vous, après une si noble et si généreuse déclaration ? Quoi ! sera-t-il dit qu’un gentilhomme aura, par ses hauts sentiments, mis une princesse de ma qualité dans l’impossibilité de lui pouvoir répondre ? Ah ! de grâce, contentez-vous de ce que je vous ai dit,

  1. Contribuer quelque chose, et non : en quelque chose. — La locution usitée au XVIIe siècle étoit calquée sur le latin : aliquid contribuere.