Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/280

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Allez, Mademoiselle, encore un coup, vivre heureuse le reste de vos jours. Que votre mariage avec ce grand prince vous rende tous les deux aussi contents que vous le méritez et que je l’ai souhaité. »

M. de Lauzun, pendant tout ce discours, fit paroître tant d’amour et un si véritable regret de la perte qu’il disoit et croyoit sans doute faire, que dans le même instant Mademoiselle lui répondit : « Je n’attendois pas un pareil bonjour de vous, Lauzun ; je croyois que mon repos vous devoit être plus cher, pour ne venir pas me l’interrompre. Il me semble que vous ne cherchez qu’à m’inquiéter de plus en plus par des alarmes qui ont si peu de fondement. Je ne songe ni ne vis que pour vous, et pour vous mettre en état de n’envier le sort de personne. Ce n’est pas l’éclat ni la qualité que je cherche ; vous savez que j’en ai refusé assez souvent, pour n’en pas chercher aujourd’hui. Êtes-vous content, Monsieur, et cette déclaration est-elle assez ample pour vous ôter tout soupçon ? Je veux encore faire davantage, et vous le verrez bientôt. » À ces mots, M. de Lauzun se jetant aux pieds de Mademoiselle : « Je vous demande pardon, lui dit-il, de ma légère conduite ; ne l’imputez, de grâce, qu’à l’amour excessif que j’ai pour Votre Altesse royale. Si j’aimois moins, je craindrois moins et vivrois plus en repos et sans inquiétude ; mais la force de mon amour ne me permettra en nulle sorte de n’être pas alarmé que je ne sois parvenu à cet heureux moment qui me doit assurer paisiblement toutes les promesses de Votre Altesse Royale. J’y vais travailler avec ardeur, afin que