Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/281

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je vous laisse jouir paisiblement de ce repos que je vous ai souvent interrompu. »

Peu de jours après, Mademoiselle, comme elle vouloit ôter toute apparence de crainte à M. de Lauzun, pria le Roi de vouloir prier Monsieur de se désister de sa recherche, et de ne point songer à elle autrement que comme ayant l’honneur d’être sa parente, ce que le Roi fit : dont Monsieur parut un peu fâché, sans savoir d’où cela provenoit. Cependant Mademoiselle ne manqua pas de dire à M. de Lauzun la prière qu’elle avoit faite au Roi, ce qui acheva de le mettre en repos, dont elle eut bien de la joie.

Or, voulant mettre fin à leurs désirs, ils demandèrent au Roi l’effet de sa parole [1]. Sa Majesté, voyant que Mademoiselle le désiroit ardemment, y acquiesça volontiers [2], de façon qu’il n’y restoit

  1. « Lorsque M. de Lauzun m’eut renvoyé ma lettre, je la donnai à Bontemps pour la donner au Roi, qui me fit une réponse très honnête. Il me disoit qu’il avoit été un peu étonné, qu’il me prioit de ne rien faire légèrement, d’y bien songer, et qu’il ne me vouloit gêner en rien ; qu’il m’aimoit, qu’il me donneroit des marques de sa tendresse lorsqu’il en trouveroit des occasions. » (Mém. de Madem., 6, p. 150.)
  2. «… Le Roi joua cette nuit-là jusqu’à deux heures… Il me trouva dans la ruelle de la Reine ; il me dit : « Vous voilà encore ici, ma cousine ? Vous ne savez pas qu’il est deux heures ? » Je lui répondis : « J’ai à parler à Votre Majesté. » Il sortit entré deux portes, et il me dit : « Il faut que je m’appuie, j’ai des vapeurs. » Je lui demandai s’il vouloit s’asseoir. Il me dit : « Non, me voilà bien. » Le cœur me battoit si violemment que je lui dis deux ou trois fois : « Sire ! Sire ! » Je lui dis, à la fin : « Je viens dire à Votre Majesté que je suis toujours dans la résolution de faire ce que je me suis donné l’honneur de lui écrire… » Il me dit : « Je ne vous conseille ni ne vous défends cette affaire ; je vous prie d’y bien songer avant de la terminer. J’ai encore, me dit-il, un autre avis à vous donner : Vous devez tenir votre