Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/327

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eut la joie de voir son cher chevalier de Fosseuse. Leur conversation fut telle qu’on peut se l’imaginer. Le chevalier de Fosseuse donna à madame de Bagneux tous les témoignages qu’elle pouvoit souhaiter de la continuation de son amour, et elle lui fit voir qu’elle avoit pour lui la même tendresse.

Bonneville apprit au baron de Villefranche qu’ils s’étoient vus. Il pensa mourir de désespoir avoir tant fait pour l’empêcher sans avoir pu y réussir, et peut-être même de leur en avoir facilité l’occasion. Il voyoit bien qu’il avoit été cause que M. de Bagneux avoit fait cette visite ; à peine sa jalousie lui laissoit-elle assez de modération pour ne point montrer sa rage à madame de Bagneux. Il partit après avoir pris congé d’elle, et M. de Bagneux fut encore deux jours en ce lieu, sans que le chevalier de Fosseuse espérât de la voir davantage. Il ne put néanmoins s’en éloigner tant qu’elle y demeura.

Il en partit enfin, mais avec une augmentation extrême d’amour. Les sentimens tendres où il l’avoit trouvée, et mille nouveaux charmes qu’il crut y avoir découverts, rendirent sa passion une des plus grandes qui aient jamais été.

M. de Bagneux fut près de deux ans en son voyage, quoiqu’il fît toutes choses possibles pour l’abréger. Ce temps dura plusieurs siècles au chevalier de Fosseuse, et madame de Bagneux n’avoit pas un désir médiocre d’en voir la fin. Les lettres qu’ils s’écrivoient leur étoient une foible consolation dans une si longue séparation, et ne faisoient qu’accroître en eux le désir de se revoir.