Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/347

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s’épandre tout d’un coup, elle ouvrit les yeux avec une langueur mortelle, accablée d’une fièvre horrible.

Ce fut alors qu’elle commença de souffrir véritablement, son esprit ayant recouvré quelque liberté. Les pensées qu’avoit son mari causèrent à son imagination un trouble plus cruel que le mal qu’elle sentoit. Ensuite elle fit réflexion au chevalier de Fosseuse, mais avec une tendresse que l’état où elle étoit ne sembloit pas lui devoir permettre, quoique néanmoins avec des soupirs qui faisoient bien voir qu’elle reconnoissoit qu’il étoit la cause de ses malheurs ; mais son cœur étoit alors tellement rempli de sa passion qu’elle ne pouvoit plus combattre pour l’en chasser, ni condamner les sentimens qu’elle lui avoit inspirés.

Des pensées si diverses et si confuses la travaillèrent si fort que sa vie fut d’abord en danger, ne s’étant jamais vu une maladie plus violente.

Le chevalier de Fosseuse, qui avoit tout appréhendé de la rencontre de M. de Bagneux, et qui en avoit appris le cruel effet avant que de s’en retourner à Paris, étoit dans un désespoir qui ne se peut représenter. Pendant le chemin il pensa plusieurs fois retourner sur ses pas et s’aller offrir à la colère de M. de Bagneux.

Mais sa douleur augmenta horriblement lorsqu’il apprit, deux jours après, combien madame de Bagneux étoit malade. Cette nouvelle lui fit oublier tout ce qui pouvoit lui être cher. Il résolut de sortir de France et d’aller attendre la mort dans d’autres parties de la terre et d’y passer le