Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/394

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s’il avoit envie qu’elle fût délivrée promptement, il falloit qu’il bût à sa santé.

Le grand Alcandre ne jugea pas à propos de répliquer à ce discours, et, ayant pris dans ce temps-là une douleur à madame de Montespan, cela rompit la conversation. Cependant elle tenoit les mains du grand Alcandre, qui l’exhortoit à prendre courage, et il demandoit à chaque moment à Clément si l’affaire ne seroit pas bientôt faite. Le travail fut assez rude, quoiqu’il ne fût pas bien long, et, madame de Montespan étant accouchée d’un garçon [1], le grand Alcandre en témoigna beaucoup de joie ; mais il ne voulut pas qu’on le dît sitôt à madame de Montespan, de peur que cela ne fût nuisible à sa santé.

Clément ayant fait tout ce qui étoit de son métier, le grand Alcandre lui versa lui-même à boire ; après quoi il se remit sous le rideau du lit, parce qu’il falloit allumer de la bougie, afin

  1. Louis-Auguste de Bourbon, duc du Maine, né le 31 mars 1670, légitimé par lettres du 19 décembre 1673. « J’ai ouï conter à M. de Lauzun que le jour qu’elle accoucha de M. du Maine, c’étoit à minuit sonnant, le dernier jour de mars, ou le premier d’avril si l’on veut, on n’eut pas le temps de l’emmailloter ; on l’entortilla dans un lange, et il le prit dans son manteau et le porta dans son carrosse, qui l’attendoit au petit parc de Saint-Germain : il mouroit de peur qu’il ne criât. » (Mém. de Montpensier, t. 6, p. 352.) On sait que mademoiselle de Montpensier lui abandonna la principauté de Dombes et le comté d’Eu pour obtenir la liberté de Lauzun et la permission de l’épouser. Madame de Montespan, qui avoit négocié cette affaire dans l’intérêt de son fils, ne promit rien en laissant tout espérer. Mademoiselle, le contrat passé, eut grand’peine à obtenir la mise en liberté du marquis.