Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/395

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que Clément vît si tout alloit bien avant que de s’en aller. Clément ayant assuré que l’accouchée n’avoit rien à craindre, celle qui l’étoit allé quérir lui donna une bourse où il y avoit cent louis d’or. Elle lui rebanda les yeux après cela ; puis, l’ayant fait remonter en carrosse, on le remena chez lui avec les mêmes cérémonies : je veux dire qu’on lui banda les yeux, comme on avoit fait en l’amenant.

Cependant M. de Lauzun tâchoit de se consoler dans les bras d’une autre ; et, tout glorieux de ce que le grand Alcandre n’avoit que son reste, il n’envioit aucunement son bonheur, soit qu’il n’eût jamais eu de véritable passion pour madame de Montespan, soit qu’il eût reconnu en elle des défauts cachés que son mari publioit être fort grands, mais sur quoi on ne l’en croyoit pas, parce qu’on savoit qu’il avoit intérêt à en dégoûter. Quoi qu’il en soit, Lauzun, n’étant plus son amant, vécut avec elle en bon ami, du moins selon toutes les apparences ; mais, pour elle, elle ne le pouvoit souffrir, parce que, lui ayant donné de si grandes prises, elle avoit peur qu’il ne la perdît auprès du grand Alcandre, où il n’avoit pas moins de pouvoir qu’elle.

Cependant, comme on n’aime jamais guère ceux qu’on appréhende, elle eût bien voulu en être défaite ; mais elle n’osoit encore l’entreprendre, de peur de n’être pas assez puissante pour en venir à bout. Comme elle étoit dans ces sentimens, la charge de dame d’honneur de la femme du grand Alcandre vint à vaquer par la mort de la duchesse de Montausier [1], et, les duchesses

  1. Madame de Montausier mourut le 14 novembre 1671.