Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/415

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chambre grillée, ne lui laissant parler à qui que ce soit, et n’ayant que des livres pour toute compagnie, avec son valet de chambre, à qui l’on annonça que, s’il vouloit demeurer avec lui, il falloit se résoudre à ne point sortir. Le chagrin qu’il eut de se voir tombé d’une si haute fortune dans un état si déplorable, le réduisit bientôt à une telle extrémité qu’on désespéra de sa vie. Il tomba même en léthargie ; de sorte qu’on dépêcha un courrier au grand Alcandre pour lui donner avis de sa mort. Mais, six heures après, il en vint un autre qui apprit sa résurrection, dont on ne témoigna ni joie ni chagrin, j’entends dans le général, chacun le comptant déjà comme un homme mort au monde, ce qui faisoit qu’on n’y prenoit plus d’intérêt.

Cependant, mademoiselle de Montpensier, étant au désespoir que les plaisirs à quoi elle s’étoit attendue avec lui fussent disparus si tôt, souffroit d’autant plus qu’elle osoit moins le faire paroître. Ses bonnes amies faisoient cependant tout ce qu’elles pouvoient pour adoucir sa douleur ; mais comme elles n’étoient pas toujours avec elle, et surtout la nuit, pendant laquelle la maladie qu’elle avoit est toujours la plus pressante, elles contribuoient plutôt à la rendre plus malheureuse,

    se réconcilia. Ils mangeoient presque tous les jours ensemble, dit Mademoiselle. Mais avant d’obtenir cette faveur, Lauzun avoit pu déjà, à force de patience, de ruse et d’industrie, entrer en correspondance avec Fouquet. C’est un passage charmant dans Saint-Simon que celui où l’on voit Lauzun raconter son élévation, et son mariage rompu avec Mademoiselle, à Fouquet, qui ne l’en peut croire, et le plaint d’une captivité qui lui a fait perdre la tête. On eut toutes les peines du monde à le désabuser. (Saint-Simon, XX, 438.)