Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/469

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j’aurois écouté volontiers quantité de sottises qu’il m’a voulu dire ; mais n’ayant pas le don de deviner, m’ennuyant d’ailleurs d’une si sotte conversation que la sienne, je l’ai prié un peu rudement de ne la pas continuer davantage ; ce qui fait que, ne le croyant pas bien intentionné pour moi, j’ai recours à vous pour lui recommander l’affaire de mon ami, dont je vous prie de faire la vôtre propre. Vous obligerez une sœur qui est toute à vous.

La duchesse de La Ferté, à qui L’Avocat venoit de protester qu’il n’avoit jamais pu dire une douceur à la duchesse de Ventadour, voyant le contraire dans cette lettre, fut tentée plus d’une fois de la lui montrer pour s’en divertir ; mais, craignant que cela ne nuisît au gentilhomme que sa sœur lui recommandoit, elle serra la lettre dans sa poche et renvoya le laquais, à qui elle commanda de dire à sa sœur qu’elle feroit ce qu’elle lui mandoit. Le laquais étant sorti, L’Avocat, qui étoit l’homme du monde le plus curieux, voulut savoir ce que contenoit la lettre, et, ne se contentant pas de ce que la duchesse lui en disoit, il chercha à lui mettre la main dans la poche et l’attrapa. Il lui dit alors qu’il verroit à ce coup-là leurs secrets ; mais qu’il n’y avoit pas beaucoup de danger pour lui, qui étoit de leurs amis.

La duchesse, qui, pour les raisons que j’ai dites, eût été bien aise qu’il ne l’eût pas vue, la lui voulut arracher ; mais, n’en ayant pu venir à bout, elle lui dit qu’il la désobligeroit s’il ne la lui rendoit à l’heure même. Mais L’Avocat, croyant