Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/98

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Disoit à Célimène :
Conservez vos froideurs,
Les hommes sont trompeurs.

Ils vous diront, peut-être,
Qu’ils aiment tendrement ;
Mais si-tôt que les traitres
Sont quinze jours absens,
On les voit inconstans.

« Voilà, ma chère, dit-elle à la Duchesse, ce que je pense en général de tous les hommes ; ce n’est pas que je ne connoisse bien qu’il est quelque commerce secret où il se trouve de la fidélité et de la constance. — Ah ! Madame, reprit la Duchesse, que vous avez de raison, et qu’il est des gens heureux dans le monde qui ne font point de bruit, qui ne veulent qu’eux-mêmes pour être les témoins de leur fidélité, et sans doute qu’elle est grande ! Mais j’avoue que je ne me puis persuader que l’amour à tambour battant soit tendre et sincère ; non, il ne l’est jamais : les hommes n’ont qu’une certaine envie de débusquer leurs rivaux, et ce n’est que par vanité que les femmes retiennent leurs esclaves ; elles seroient bien fâchées si l’on ne disoit en cour : Monsieur le duc, monsieur le comte, monsieur le chevalier est amoureux de madame une telle. Elles aiment bien mieux l’éclat et la dépense que des soupirs et des larmes. Ainsi il ne faut pas s’étonner si ces commerces se rompent : comme l’on trouve partout des belles, on en retrouve autant que l’on en perd. Mais, Madame, on ne trouve pas aisément des personnes qui aient l’esprit éclairé et au-dessus des bagatelles,