Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/207

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t-elle, ce n’est que pour prouver que le comte du Roure n’a pas eu l’avantage d’en cueillir la première fleur, ni ceux qui l’aiment aujourd’hui. — Ne savez-vous pas, répondit Monseigneur, qu’à la Cour il n’y a pas de charge plus difficile à exercer que celle de fille d’honneur ? Vous seriez bien embarrassée au choix, et je ne sais si en pareil cas vous pourriez répondre de vous-même. Croyez-moi, madame, il y a toujours de l’embarras quand on veut se mêler des affaires d’autrui ; que celle qui se croit nette ou exempte de soupçon, jette la première pierre contre elle. »

La princesse connut bien que le Dauphin n’étoit pas satisfait de cette conversation, qui le regardoit en partie ; elle prit donc congé sur le prétexte de vouloir se trouver à une symphonie de voix et d’instruments qui devoit se donner chez madame de Maintenon, où elle avoit été invitée, et où Monseigneur ne voulut pas la suivre, ne pouvant supporter la Maintenon ; et l’on peut dire que l’adversion que ce prince a pour elle va jusqu’à la haine, et que, s’il la ménage en quelque sorte, ce n’est qu’à la considération du Roi, mais que, s’il étoit le maître, il l’enfermeroit dès le premier jour aux Madelonnettes[1].

Le Dauphin ne manqua pas d’aller visiter la comtesse du Roure, comme il le lui avoit promis

  1. La célèbre maison des Madelonnettes étoit située rue des Fontaines, dans le quartier Saint-Martin. Dirigée d’abord par les Visitandines, puis par les Ursulines, elle fut ensuite gouvernée par les religieuses de Saint-Michel, qui seules obtinrent quelques succès dans la conduite des filles repenties.