Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/237

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vous vous souvenez de ce que vous nous disiez l’autre jour en parlant de vos forces, vous trouverez que, sans avoir demandé le congrès, comme l’homme que voici, vous avez aussi bien opéré l’un que l’autre. Vous n’avez plus qu’à vous marier après cela : c’est le moyen d’étendre votre réputation bien loin, et je ne désespère pas de vous voir aussi bien que lui sur ma cheminée.

— Vous ayez raison, Madame, lui dit le duc de Sault, de m’insulter comme vous faites, et mon offense est d’une nature à ne me la jamais pardonner. Pour moi, je ne me connois plus, et après avoir bien rêvé à mon malheur, je ne puis l’attribuer qu’à une chose. Vous connoissez, continua-t-il, la poudre de Polville ? j’en ai mis ce matin partout. Que maudit soit La Vienne[1], qui m’a donné cette belle invention, et qui, pour me faire sentir bon, me fait devenir insensible ! Mais, Madame, le charme ne durera que jusqu’à ce que je me sois baigné. Donnez moi ce temps-là, je vous conjure, et si j’ai manqué à vous satisfaire quand j’y étois obligé, j’en payerai plutôt l’intérêt. Souvenez-vous cependant que je ne suis pas le seul que La Vienne ait engagé dans cette malheureuse

  1. La Vienne étoit barbier-étuviste. On ne prenoit pas seulement des bains chez lui, comme chez ses autres confrères moins connus, on y logeoit (voy. Furetière, Dict., vo Baigneur), etc. L’on y recevoit tous les soins de toilette : La Vienne rasoit, frisoit, parfumoit, coiffoit ; il partageoit, comme baigneur, la réputation de Prud’homme ; comme coiffeur, celle de Champagne. (Voy. madame de Sévigné, Lettre du 4 avril 1671.) La Vienne avoit un emploi à la cour. Il étoit un des huit barbiers du Roi, servant par quartier, aux gages de six cents livres ; il faisoit son service dans le trimestre