Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/279

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Lionne qu’il avoit raison. « Quoi ! c’est donc vous, monsieur le duc ? lui dit-elle ; et que venez-vous chercher ici ? — Je ne vous mentirai point, Madame, lui dit-il : je ne vous cherchois, non plus que ce n’étoit pas moi que vous cherchiez ; c’est pourquoi, si vous m’en croyez, vous me laisserez continuer mon aventure, de peur que je n’interrompe la vôtre ; et voilà comme, entre gens comme nous, il faut vivre dans le siècle où nous sommes. » La proposition étoit fort honnête et fort raisonnable, comme il est aisé de juger ; mais, soit qu’il y eût déjà longtemps qu’elle eût envie de tâter de lui, ou que, le temps du rendez-vous du comte de Fiesque étant passé, il lui fût insupportable de passer la nuit toute seule, pendant que sa fille la passeroit en compagnie : « Non, non, monsieur le duc, disoit-elle, cela n’ira pas comme vous le pensez. Je sais que c’est à ma fille que vous en voulez ; mais, ne lui en déplaise, ni à vous, je profiterai de l’occasion, puisqu’elle s’offre sans que j’y pense. Apparemment le charme du Polville est passé, et il faut que vous m’en donniez des marques tout à l’heure. »

A ces mots, qui se disoient le plus bas qu’elle pouvoit, de peur que quelqu’un ne l’écoutât, elle voulut l’amener dans sa chambre ; mais lui, qui ne pouvoit consentir au change : « Ah ! Madame, lui dit-il en se faisant tirer de force, j’ai promis à madame de Cœuvres que je l’irois trouver, je ne puis lui manquer de parole, et permettez du moins que je m’aille dégager d’avec elle, après quoi je vous promets de vous donner toute sorte de contentement. » La dame ne fut pas si crédule qu’elle se voulût fier à lui ; comme elle avoit