Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/322

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Le duc de Longueville, au contraire, y fut en gros habit de drap gris de fer ; mais, quelque négligé qu’il fût, il n’en parut pas moins charmant à la dame. Ainsi, comme elle étoit pressée de contenter sa passion, elle trouva à redire qu’il se fût fait accompagner par le comte de Fiesque, jugeant de là qu’il falloit que son empressement ne fût pas égal au sien. Le duc de Longueville, après les premiers compliments, lui dit qu’ayant appris par son ami les obligations qu’il lui avoit, il venoit, non-seulement pour l’en remercier, mais encore pour lui promettre une amitié éternelle ; qu’il ne tiendroit qu’à elle qu’ils ne s’aimassent toute leur vie ; que pour cet effet il avoit amené le comte de Fiesque, afin qu’il lui pût reprocher un jour, s’il manquoit jamais à ce qu’il lui alloit promettre ; qu’il ne verroit plus mademoiselle de Fiennes[1], pour qui on vouloit qu’il eût de l’amitié, et qu’il la laissoit au chevalier de Lorraine, qui étoit son véritable tenant ; qu’il en useroit de même à l’égard de toutes les dames qui lui pourroient être suspectes, si bien qu’elle n’auroit qu’à l’en avertir quand elle voudroit qu’il ne les vît plus ; mais qu’il

  1. Mademoiselle de Fiennes étoit fille d’un fils de la nourrice de la reine d’Angleterre, lequel avoit épousé, à vingt-deux ans, une dame d’atours de cette reine. Madame de Fiennes avoit quarante ans au moment où elle se maria ainsi par amour ; et mademoiselle de Montpensier, qui avoit tant de raisons pour n’être pas sévère, lui reproche cette folie qui l’a faite « belle-fille de madame la nourrice, belle-sœur de toutes ses femmes de chambre, et femme d’un jeune homme de vingt-deux ans, sans bien, sans charge, parce qu’il est beau et bien fait. » Elle la blâme ensuite de n’avoir déclaré son mariage que quand elle étoit prête d’accoucher de cette fille dont il est ici question.