Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/323

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vouloit qu’à son tour elle lui promît la même chose touchant ceux qui lui pouvoient donner de la jalousie, ajoutant qu’il étoit si délicat qu’il ne pouvoit rien voir de cette nature sans se brouiller avec elle.

Le comte de Fiesque, qui servoit de médiateur en cette occasion, dit que cela étoit juste, et la maréchale étoit trop raisonnable pour s’y opposer. En effet, bien loin d’y trouver à redire, elle renchérit encore par-dessus, disant qu’il la faudroit noyer si elle n’étoit pas contente de la possession d’un cœur aussi illustre que le sien. Le marché étant ainsi conclu, sans y faire davantage de façons, il lui baisa la main en signe d’amitié ; mais elle, qui ne croyoit pas que de telles arrhes fussent suffisantes, lui jeta les bras au cou et le baisa fort amoureusement. Si le pauvre prince n’eût pas été malade, il étoit d’une complexion trop reconnoissante pour n’y pas répondre comme il falloit ; mais sachant que ce n’est pas en cette occasion qu’il faut reprendre le poil de la bête pour se guérir, il rompit les chiens le plus tôt qu’il lui fut possible, sous promesse de la revenir voir tout seul le lendemain. Mais comme il lui eût été impossible de lui faire sa cour dans toutes les formes, ou du moins qu’ils eussent eu lieu tous deux de s’en repentir, il trouva une maladie de commande, qui lui donna le temps de se préparer au combat qu’elle lui demandoit.

La visite qu’il lui avoit rendue alarma les amants qui avoient eu leur congé, et il n’y en eut point qui ne crût qu’il lui avoit été sacrifié. Cependant, comme cette visite fut quelque temps