Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/326

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Ces paroles, qui furent suivies de beaucoup d’autres reproches, donnèrent de la confusion à la maréchale ; et, croyant que ses pleurs persuaderoient son amie de son innocence, comme elle les faisoit venir sans peine quand elle en avoit besoin, elle en répandit assez pour faire pitié à ceux qui n’auroient pas su qu’elle étoit une admirable comédienne quand elle vouloit. Cependant, son amie feignant d’être persuadée que ce n’étoit qu’une médisance, elle blâma le comte d’Olonne, qui, croyant que ce qu’elle en disoit étoit de bonne foi, se mit à lui faire mille serments qu’il ne lui disoit rien que de véritable. Elle lui répondit qu’elle ne le croyoit pas ; mais que, quand cela seroit, il avoit tort de se vanter d’une chose comme celle-là.

D’Olonne, ayant encore évaporé sa bile, se retira ; et quand il fut sorti, la maréchale jura qu’elle en avertiroit son mari. Mais elle n’avoit garde : il étoit dans le lit à crier les gouttes, et, comme il y avoit déjà longtemps que ce mal lui tenoit, il ignoroit la belle vie qu’elle avoit menée et qu’elle menoit actuellement.

Son incommodité fut cause que, le duc de Longueville étant guéri, il ne put voir pareillement l’amour qu’il avoit pour elle et celle qu’elle avoit pour lui, ce qui lui auroit été facile sans cela : car, non-seulement elle bannit tous les autres pour l’amour de lui, mais elle se priva encore du jeu, qui étoit sa seconde passion. La raison fut qu’elle eut peur que, comme cela ouvroit indifféremment la porte à tout le monde, ce ne lui fût un sujet de jalousie. Leurs premières entrevues se firent à l’hôtel de La Ferté, où