Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/402

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Quoiqu’elle l’eût déjà voulu voir dehors, elle ne le voulut pas laisser sortir néanmoins qu’il n’eût pris quelque chose ; et ce qui venoit de se passer l’ayant rendu plus traitable qu’auparavant, il prit un bouillon, qui lui fit beaucoup de bien. Il mangea outre cela tout au moins pour quatre sous de pain[1], un grand pot de confitures, une douzaine de noix confites, et but une bouteille de vin. Avec ce secours il prit des forces pour pouvoir s’en aller ; mais, de peur que le suisse ne l’aperçût, il fit une station dans la salle en bas, comme il avoit fait en arrivant, pendant laquelle la duchesse d’Aumont fit monter le suisse, sous prétexte de lui dire ceux qu’elle vouloit qu’il laissât entrer et ceux qu’elle ne vouloit pas qui entrassent.

L’embarras où ils s’étoient trouvés fut cause qu’ils ne songèrent pas à prendre des mesures pour se revoir sitôt. Mais la maison de madame de Bonnelle étant un lieu propre à se donner

  1. L’auteur nous donne, pour ainsi dire, la mesure de l’appétit du duc de Caderousse après son jeûne prolongé. Quelques années après l’époque qui nous occupe, le pain continuoit à être divisé en deux catégories : le gros pain et le petit pain.

    Quand le blé étoit vendu vingt livres le septier, ce qui étoit un prix moyen, le gros pain blanc valoit deux sous six deniers la livre ; le pain bis-blanc ou bourgeois, deux sous deux deniers ; le pain bis, un sou six deniers.

    Le petit pain étoit alors vendu un sou ou deux sous : le prix ne varioit pas, mais le poids varioit selon le prix du blé. Quand le blé valoit vingt livres le septier, le pain façon de Gonesse de deux sous pesoit neuf onces, ou, d’un sou, quatre onces et demie ; le pain de chapitre d’un sou pesoit quatre onces et demie ; le pain mollet, le pain à la reine, le pain à la sigovie, le pain à la mode et le pain cornu ne pesoient que trois onces et demie.