Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/422

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qu’il n’avoit fait l’autre fois, il voulut lui en donner des marques à l’heure même. C’étoit quelque chose de bien touchant pour une femme de son humeur, et peut-être qu’elle ne s’étoit jamais fait violence que cette fois-là sur l’article ; mais, s’étant mise en tête de l’épouser, elle lui dit que ce n’étoit plus le temps ; « que la force de l’amitié qu’elle avoit pour lui lui avoit fait passer autrefois par-dessus toute sorte de considération ; mais que, si ses feux étoient aussi ardents qu’il le vouloit faire paroître, il en pouvoit chercher l’accomplissement par des désirs légitimes, et non pas par où il en vouloit venir. » Ce retour auroit eu de quoi l’affliger, s’il eût été fort amoureux ; mais, y ayant plus de débauche à son fait que de passion, il prit la chose en raillerie, et lui dit qu’il étoit sûr que ce qu’elle en faisoit n’étoit que pour l’éprouver ; qu’elle savoit à quoi sa femme l’avoit obligé en mourant, et qu’elle vouloit voir, sans doute, s’il seroit homme de parole. « A quoi vous a-t-elle donc obligé, Monsieur ? lui répliqua-t-elle. — A ne me jamais remarier, Madame, lui répondit-il, et vous ne voudriez pas que je faussasse mon serment. » Je ne sais si elle avoit connoissance ou non de cette circonstance ; quoi qu’il en soit, elle traita cela de bagatelle, et, pour lui rendre le change, elle lui dit que M. de Rambures l’avoit priée de même, en mourant, d’être sage ; que son exemple la remettoit dans le bon chemin, dont elle n’étoit sortie que pour l’amour de lui, et qu’elle lui en auroit obligation toute sa vie.

Elle disoit tout cela d’un si grand sang-froid, que son air valoit encore mieux que ses paroles ; cependant