Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/467

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pensée quand l’archevêque, qui croyoit qu’une lettre faisoit autant d’effet que la parole, lui envoya celle-ci :

Lettre de l’Archevêque de Reimsa la Duchesse d’Aumont.


Je vois bien des femmes, mais je n’en vois point qui me plaisent tant que vous. J’enrage que je ne sois du monde pour vous le pouvoir dire ouvertement : l’on me verroit à vos pieds sans me soucier ni de l’alliance que j’ai avec votre mari, ni des jaloux que je pourrois faire ; mais il faut déférer quelque chose au rang que je tiens, qui n’empêchera point pourtant que je m’y rende si vous l’avez agréable. Songez, cependant, que l’intérêt que les gens comme moi ont d’être discrets assure la réputation d’une femme, laquelle court grand risque avec les galants de profession.

La duchesse n’étoit pas fâchée que l’archevêque l’aimât, mais elle trouva cette déclaration trop cavalière, et elle eût voulu que, comme elle faisoit profession de piété, il lui en eût fait quelque mention, c’est-à-dire qu’il lui eût témoigné moins de confiance dans son entreprise. C’est ainsi qu’elle cherchoit les apparences de vertu quand elle y avoit renoncé absolument. Mais l’archevêque n’étoit pas un homme à s’amuser à ces bagatelles, lui qui alloit droit au fait et dont la coutume étoit de ne ménager personne ; aussi, voyant qu’il n’avoit point de réponse de son billet, il s’en fut chez elle, où, le