Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/490

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

il est difficile qu’en continuant toujours le même métier l’on ne soit à la fin reconnu, il arriva qu’un homme d’Angers perdit mille écus, ce qui fit que toutes choses furent découvertes. Cela se passa de cette manière : Cet homme, qui étoit riche, aimoit les femmes, et un filou, ayant reconnu son inclination, le mena en voir une à petit couvent au faubourg Saint-Jacques, qui sert ordinairement de retraite à toutes les filles qui ont eu quelque affaire et à toutes les femmes qui sont mal avec leurs maris pour quelque galanterie. Il lui fit accroire que c’étoit une femme de qualité, et celui-ci, qui ne connoissoit pas encore Paris, la trouva si à son gré que, pendant un mois entier, il ne fut point de jour sans lui rendre visite.

La dame ne manqua pas de lui témoigner de la reconnoissance, et, cela l’ayant rendu encore plus amoureux, il la pria de vouloir sortir de ce couvent, où il ne la pouvoit voir si commodément qu’il vouloit. La dame, le voyant tout à fait engagé, feignit de se rendre à ses raisons, et, étant allée chez une de ses amies, qui ne valoit pas mieux qu’elle, elle lui fit valoir pour une grande grâce la permission qu’elle lui donnoit de l’y venir visiter. Dès la seconde fois il y trouva le duc de Vantadour et deux ou trois autres dames, l’une desquelles ayant proposé de jouer à la bête[1] en attendant qu’il fût heure d’aller à la comédie, on fit si bien qu’on l’y engagea.

    tentation, — on ne se faisoit aucun scrupule d’aider un peu ou de corriger la fortune. L’abus ne cessa pas entre Mazarin et la marquise de Parolignac, un des personnages de Candide.

  1. Le jeu de la bête ou de l’homme étoit un jeu où le perdant payoit, non sa mise, mais celle de tous les joueurs.