Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/496

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rôle qu’elle étoit encore regardée comme une sainte ; mais, lorsqu’elle y pensoit le moins, il arriva un accident qui fit tout découvrir, et ce qui la désespéra davantage, c’est que ce malheur arriva par son beau-fils.

Le duc d’Aumont en avoit un, comme nous avons dit, de son premier lit ; et comme il étoit déjà assez grand, il l’avoit envoyé en Italie, afin que les pays étrangers pussent aider à le rendre encore plus honnête homme. Au retour de son voyage, ce jeune homme, qui étoit vigoureux et plein de santé, trouvant chez sa belle-mère une femme de chambre fort jolie, en devint amoureux ; ayant trouvé moyen de la séduire, il commença avec elle le métier qui est si fort en usage à la cour. Cette fille trouva cela le meilleur du monde ; et, quoiqu’elle fût plus âgée que lui, et qu’elle dût par conséquent prendre plus de précaution pour cacher ses affaires, néanmoins, comme c’est le propre de l’amour d’ôter la raison, ils en manquèrent tellement l’un et l’autre que la duchesse s’aperçut bientôt de ce petit commerce. Elle prit le parti ordinaire des dévots et des dévotes, qui est de faire grand bruit des défauts de son prochain. Peu s’en fallut même qu’elle ne mît la main sur cette fille ; mais enfin, faisant réflexion que cela ne seroit pas bien à une femme de qualité, elle se contenta, après lui avoir dit mille injures, de lui faire commandement de sortir de sa maison. Il est aisé de juger de l’affliction de la fille à un commandement si funeste à son amour ; elle se fondit toute en larmes, et le marquis de Villequier, c’est ainsi que s’appelle le fils aîné du