Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/497

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duc d’Aumont, l’ayant trouvée en cet état, se mit aussi à pleurer, voyant qu’il alloit être privé de sa présence. La fille se sentit en quelque façon consolée de voir qu’il prenoit tant de part dans son affliction, et le regardant tendrement : « Madame a grand tort, lui dit-elle, d’en user avec tant de rigueur ; elle n’est pas plus sage que les autres, et si M. le duc savoit ce que je sais, il n’auroit garde d’en être si content. » C’en étoit assez dire à un jeune homme, et surtout à un beau-fils, qui a toujours la haine dans le cœur pour une belle-mère. Pour contenter sa curiosité, il lui demanda avec empressement ce qu’elle vouloit dire, et, voyant que la crainte de s’exposer à quelque traitement fâcheux la rendoit plus retenue, il lui protesta non seulement qu’il ne prenoit point de part à ce qu’elle lui diroit, mais même qu’il en seroit ravi. Avec de telles assurances, elle ne balança plus à lui ouvrir son cœur ; elle lui dit que le duc de Roquelaure avoit été bien avec la duchesse, mais que, depuis son mariage, leur commerce s’étant beaucoup ralenti, l’archevêque de Reims avoit pris sa place. « Quoi ! mon oncle ! s’écria en même temps le marquis de Villequier, tout étonné ; ah ! j’ai peine à le croire, et tu n’es assurément qu’une médisante — Il faut vous le faire voir, lui dit-elle, puisque vous êtes incrédule, et ce sera aussitôt que monsieur le duc ira à Versailles. » Le marquis de Villequier n’eut rien à dire après des offres si raisonnables, et, l’ayant voulu questionner, elle lui répondit que, puisque tout ce qu’elle lui pouvoit dire étoit inutile, il falloit qu’il se donnât patience. Cependant,