Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/511

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Il avoit épousé une des filles du duc d’Aumont, du premier lit. C’étoit une jeune dame qui, dans une médiocre beauté, avoit beaucoup d’agrément. Elle aimoit son mari, et il lui eût été fâcheux d’apprendre cette nouvelle ; mais l’archevêque de Reims, qui n’avoit plus osé retourner chez la duchesse d’Aumont depuis l’éclat qu’avoit fait le marquis de Villequier, l’ayant trouvée à son gré, il résolut de s’établir auprès d’elle sur les ruines de son mari.

La facilité qu’il avoit de la voir en qualité d’oncle ayant encore augmenté son amour, il chercha à s’insinuer dans l’esprit du marquis, sous les plus beaux prétextes du monde. Il lui fit beaucoup de bien, et non content de l’avoir gagné par-là, il lui fit espérer que ce seroit lui qu’il feroit son héritier. Cependant, pour pouvoir voir la marquise à toute heure, il loua l’hôtel de Longueville[1], dont le derrière répondoit à l’hôtel de Créqui[2], et, ayant fait faire une porte de communication, le bon prélat étoit auprès d’elle depuis le matin jusques au soir. Il prit son temps pour lui apprendre que son mari étoit amoureux ailleurs, et ayant jeté le trouble dans son esprit par cette nouvelle : « Que vous êtes

  1. L’hôtel de Longueville, voisin de l’hôtel de Rambouillet et de l’enclos des Quinze-Vingts, étoit situé dans la rue Saint-Thomas du Louvre. Il avoit porté successivement, d’après ses propriétaires, les noms d’hôtel de la Vieuville, de Luynes, de Chevreuse, et enfin d’Epernon. Bâti par Metezeau, décoré par Mignard, l’hôtel de Longueville finit par devenir, en 1749, un magasin de tabacs.
  2. L’hôtel de Créqui étoit dans la rue des Poulies. Il fut bâti pour Charles de Créqui, l’année où celui-ci fut fait maréchal de France, en 1622.