Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/520

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Montauban valoit mieux que mille autres à qui elle avoit eu affaire. Elles se brouillèrent ainsi toutes deux, et la princesse de Montauban eut tellement la vengeance en tête, qu’elle fut avertir le marquis de Polignac qu’il devoit envoyer sa femme à la campagne. Cela lui donna lieu d’observer sa conduite, et il reconnut bientôt qu’il avoit un rival du premier rang.

Le Roi s’en aperçut de même, aussi bien que madame la Dauphine ; et, sachant tous deux que la marquise de Polignac ne s’éloigneroit point de la cour sans un ordre exprès, il lui fut envoyé en forme. Elle en fut inconsolable, aussi bien que monseigneur le Dauphin ; et s’étant vus, elle lui demanda s’il ne vouloit point agir auprès du Roi pour détourner un coup si fatal à l’un et à l’autre. Monseigneur le Dauphin parut mou, et, la marquise s’en étant plainte au marquis de Créqui, il lui promit qu’il alloit faire de son mieux pour lui donner du courage. Et de fait, il lui dit qu’il étoit bien simple d’en user comme il faisoit ; que le maréchal de Créqui étoit tout aussi fier que le pouvoit être le Roi, à la réserve qu’il n’avoit pas la souveraine puissance entre ses mains ; cependant qu’il l’avoit mis sur le bon pied ; qu’il suivît son exemple, et qu’il s’en trouveroit mieux devant qu’il fût peu de temps. Cette conversation n’ayant rien fait sur l’esprit de ce jeune prince[1], la marquise de Polignac lui renvoya

  1. « Vendredi 13 déc. 1686 : « On croit que le marquis de Créqui ira voyager, et que la Cour a conseillé à son père de lui faire prendre ce parti-là. On dit aussi que madame de Polignac ne paraîtra pas sitôt à la Cour. Monseigneur lui a fait dire par…. qu’il ne vouloit plus avoir de commerce avec elle. » (Journal de Dangeau, I, 428.).