Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/60

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

C’est ce funeste auteur de toutes nos misères
Qui chassa du jardin le premier de nos pères,
Et pour prix de sa foi lui promit un trésor.
Ce serpent garde encor son ancienne malice ;
Il se couvre de fleurs, et tout son artifice
Est de tromper son maître avec la pomme d’or.

Il n’est pas nécessaire de vous dire que la lecture de ce sonnet fit changer l’entretien : on connut d’abord l’excès de la satyre, et chacun voulut faire paroître son zèle pour en rechercher l’auteur ; mais ce fut inutilement. On l’attribua à un Italien fort critique, qui s’appeloit Gerolamo Pamphilio ; quelques mécontentemens qu’il avoit reçus sans sujet d’un des ministres d’État donnèrent fondement de croire que c’étoit lui qui avoit ainsi répandu sa bile sur tous les autres ; il avoit déjà été soupçonné d’être l’auteur de cette inscription qui fit tant de bruit et qui fut placée dans un cartouche au-dessus de la porte de la chambre d’Astérie, un jour que le roi lui donnoit le divertissement de la musique. Comme je crois que personne ne l’ignore, je ne la mets point ici, outre qu’elle ne fait rien au sujet.

Revenons à mademoiselle de Fontange, que nous avons laissée avec le Roi, bien fâchée de ce qu’elle avoit servi de divertissement à la compagnie. Elle témoigna que cette aventure la touchoit d’autant plus vivement, qu’on l’attaquoit dans ce qu’elle avoit de plus sensible. Le Roi n’en marqua pas moins de déplaisir, mais seulement à cause qu’il en donnoit à sa maîtresse ; car, pour lui, on peut dire qu’il se met au-dessus de ces sortes de bagatelles. Il la consola