Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/118

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

permet pas à cette comtesse de m’accorder pendant le jour ce qu’elle ne me refusera pas la nuit, et ce que j’aurois déjà obtenu d’elle sans mon malheur. Peut-être, ajouta-t-il, qu’elle craint un second affront, et que je tombe dans une disgrâce semblable à celle qui m’est arrivée. Mais je prendrai si bien mes mesures, qu’elle n’aura pas sujet de se plaindre de moi. »

Flatté de cette pensée, il donna les ordres nécessaires pour une seconde mascarade. La plupart de ceux qui s’étoient masqués le jour précédent, changèrent d’habit et de masque, soit qu’ils voulussent plaire au Roi par cette diversité, soit qu’ils eussent quelqu’autre dessein. La comtesse, qui n’en avoit aucun, et qui ne se déguisa que parce qu’elle ne pouvoit pas s’en dispenser, n’y fit aucun changement, et parut avec les mêmes habits. La Montespan, qui la vouloit encore imiter pour les raisons que j’ai dites, sachant le dessein de la comtesse, par cette même fille qui étoit à sa dévotion, ne changea rien non plus à son ajustement ; et voulant achever ce qu’elle avoit commencé, elle résolut de s’écarter quand il feroit nuit, et de se rendre dans le même endroit où le Roi l’avoit trouvée le jour précédent, lorsqu’il l’avoit prise pour la comtesse, s’imaginant bien qu’il ne manqueroit pas d’y aller lui-même, dans l’espérance d’y rencontrer celle qu’il cherchoit, et parce que c’étoit un lieu tout-à-fait propre à son dessein.

Cependant elle fit avertir le comte, par des gens qui dépendoient d’elle, de prendre garde à sa femme ; qu’ils avoient remarqué la nuit passée,