Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/123

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Roi ; j’ai remarqué tantôt qu’il s’est écarté, et il alloit, ce me semble, vers l’endroit d’où j’ai vu sortir cette femme, et je ne l’ai pas vu depuis. »

Le comte n’eut pas plus tôt achevé de dire ces paroles, que le Roi, qu’on ne pouvoit méconnoître, parut, venant de ce même endroit, ce qui acheva de les confirmer dans la pensée du comte. Si ce dernier fut surpris quand il vit sortir de ce cabinet une femme qui ressembloit si fort à la sienne, le grand Alcandre ne le fut pas moins, quand il vit sa chère comtesse tête à tête avec un homme. — « Je ne me trompe pas, disoit-il, c’est elle-même, c’est elle qui vient de me quitter, ce sont les mêmes habits. » Il avoit raison en effet de la prendre pour la comtesse ; mais il se trompa quand il crut que c’étoit celle qui venoit de lui donner tant de plaisir dans ce petit cabinet ; elle étoit bien loin de là ; car la Montespan, de peur d’être découverte, alla incontinent changer d’habit et de masque. Croyant donc que c’étoit la même personne, il sentit d’abord quelques mouvements de jalousie. Mais cette passion fit bientôt place à une autre. Le comte et la comtesse s’étant donné à connoître au grand Alcandre, ce prince fut tout remis de voir que c’étoit le mari de la comtesse, qu’il regarda d’abord comme un rempart à ce qu’il craignoit, et à l’aventure secrète qu’il croyoit avoir eue avec sa femme. Dans cette pensée, il se mit en humeur de railler, et il dit agréablement au comte et à la comtesse, qu’apparemment ils ne s’étoient pas déguisés pour chercher quelque bonne fortune, puisqu’il les voyoit ensemble. — « Il est vrai, répondit le comte, que ma femme