Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/158

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le principe de toutes choses, suivant la pensée d’un philosophe[1].

Le Roi. — Quoi, Mademoiselle, vous suivez déjà les idées de ces grands hommes à l’âge où vous êtes ? Ah ! défaites-vous de ces pensées obscures et douteuses, qui ne font que fatiguer les personnes qui s’y abandonnent.

Mlle du Tron, d’une manière précieuse. — Sire, Votre Majesté saura aussi que je ne m’embarrasse pas beaucoup des sentiments erronés des philosophes ; je n’en parle seulement qu’en passant, et pour me divertir.

Le Roi. — Vous faites très-bien, ma chère demoiselle, de ne vous pas occuper l’esprit de ces fadaises qui n’ont rien de solide ; l’Amour, ce petit Dieu des cœurs, est quelque chose de bien plus doux.

Mlle du Tron, poussant un grand soupir. — Ah ! Sire, ce nom me fait trembler. Dieux, qu’il est redoutable, cet amour que Votre Majesté trouve si charmant !

Le Roi. — Hé ! que vous a fait, Mademoiselle, ce pauvre enfant pour le traiter de la sorte ? Ce n’est pas l’amour qui fait peur aux belles comme vous ; car je sais que vous aimez, et peut-être de plus d’une manière.

Mlle du Tron. — Votre Majesté, mon Prince, m’apprend qu’il y a plusieurs amours ; mais j’ai toujours cru qu’il n’y en avoit qu’un qui soutenoit l’Univers.

Le Roi, se passionnant. — Il est vrai, ma

  1. Le philosophe Thalès prétendait que l’eau était l’origine de toutes choses.