Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/204

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Madame, que vous condamnez de la sorte ? La nature n’a rien fait en vain.

Mme de Maintenon. — C’est la galanterie, et ces amusements de Cour par lesquels le Seigneur est offensé.

Le Roi, en riant. — Bon, n’est-ce que cela ? pure bagatelle, Madame ; ce sont les actions les plus innocentes de l’homme que celles de l’amour, et où il entre le moins de crime. N’est-ce pas la nature qui les a formées elle-même ? Est-il donc rien de plus injuste que de condamner un penchant si doux et si universel ?

Mme de Maintenon. — Je sais bien, Sire, que c’est celui qui vous entraîne. Il faut donc se rendre, sans combattre davantage vos sentiments. Mon Dieu, que Votre Majesté me paroît changée, depuis qu’elle voit Mademoiselle du Tron !

Le Roi. — En quoi, Madame, me trouvez-vous si changé ?

Mme de Maintenon. — En toutes manières.

Le Roi. — Mais encore, Madame ?

Mme de Maintenon. — En votre personne royale, en vos sentiments. Hélas ! avant la vue fatale de cette syrène, Votre Majesté avoit un langage bien plus édifiant !

Le Roi, avec mépris. — Vous êtes dans l’erreur, Madame ; c’est la force de votre dévotion qui vous inspire ces idées chagrines, qui ne viennent que d’une bile noire qui se répand dans vos veines. Prenez médecine, si vous m’en croyez, pour dissiper ces méchantes humeurs qui vous rendent insupportables à vous-même.