Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/225

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Hélas ! que deviendrois-je, mon Sauveur, si la mort m’enlevoit mon cher Prince ?

Le Roi, d’un air railleur. — Calmez vos ennuis, Madame ; eh ! monsieur le Médecin, je ne suis pas encore si près de la mort que vous pensez ; il me semble que je renais depuis quelque temps, je sens même augmenter ma vigueur de moment en moment.

M. Fagon, en riant. — Sire, Votre Majesté en a besoin.

Le Roi. — Je vous entends, Monsieur, nous en viendrons à bout avec le temps.

Mme de Maintenon. — Saint Ignace me puisse-t-il abandonner, si avant qu’il soit un mois, Votre Majesté ne regrette la paix et la douceur qu’elle goûtoit dans l’indifférence.

Mlle du Tron, au Roi. — Que cette vieille dame est ridicule avec son discours suranné, et ses expressions sanctifiées ! Plût à Dieu que Saint Ignace l’emportât d’ici, et qu’elle nous laissât en repos.

Le Roi lui dit tout bas. — Un peu de complaisance, Mademoiselle, je vais bientôt la renvoyer dire son chapelet.

Mme de Maintenon. — Sire, Monsieur Erizzo[1], ambassadeur de Venise, est arrivé à

  1. Erizzo, ambassadeur de Venise, étoit reçu en audience le mardi, comme tous les ministres étrangers. Le 15 octobre 1695, la Gazette de France, d’accord avec Dangeau, rapporte que le Roi lui accorda le 5 du même mois une faveur sans précédent : il donna une audience à sa femme : « le Roi étoit debout auprès de sa table, dit Dangeau, et, dès qu’il vit l’ambassadrice, il avança deux ou trois pas à elle et la baisa ; et après quelques compliments qu’ils se firent, toujours debout, l’ambassadrice se