Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/227

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Mme de Maintenon. — Sire, il faut dissimuler, et lui faire connoître que Votre Majesté prend beaucoup de part à la victoire que la République a remportée sur les Turcs dans la Morée.

Le Roi. — Comment accorder ces paroles à son cœur ?

Mme de Maintenon. — Mon Prince, il faut s’accommoder au temps.

Le Roi, poussant un soupir. — L’étrange politique ! mais qui ne peut dissimuler ne peut régner. Madame, qu’on fasse mes compliments à l’Envoyé de Venise, et qu’on lui dise qu’en bref je lui donnerai audience.

Mme de Maintenon. — L’on suivra vos ordres, Sire ; mais quand Votre Majesté viendra-t-elle à Versailles ?

Le Roi, d’une façon impatiente. — Je verrai, Madame ; allez seulement.

M. Fagon. — Sire, je prends la liberté d’accompagner, Madame.

Le Roi. — Vous ferez bien, de peur qu’elle ne s’amuse en chemin.

Mme de Maintenon. — Adieu, mon cher Monarque, conservez votre santé.

Le Roi. — Adieu, Madame, conservez votre esprit.

ENTRETIEN XXII.

Le Roi et Mademoiselle du Tron.

Le Roi. — La pauvre femme n’en peut plus, la jalousie l’étouffe, elle croit que je suis mort, éloigné de ses yeux ; mais de la mort dont l’amour me menace, j’espère d’en revenir.

Mlle du Tron. — Ah ! mon Prince, qu’une tendresse aussi outrée est peu agréable ! il y entre du dépit, de l’envie, de l’intérêt, de la rage, et enfin tout ce qui est de plus lâche, et de plus abominable. Le cœur de cette dame est

    retira. » Saint-Simon, dans ses notes sur Dangeau, donne les règles d’étiquette ordinairement suivies dans des occasions analogues.

    Quatre jours après, le dimanche 9 octobre « le Roi tint sur les fonts de baptême la fille du sieur Erizzo. Sa Majesté la nomma Louise, Madame fut la marraine, et la cérémonie fut faite dans la chapelle du château par le cardinal de Bouillon, grand aumônier de France. Le Roi et la Reine d’Angleterre y assistèrent. » (Gazette de France.)

    Erizzo ne se montra pas reconnoissant de ces faveurs répétées. Le jeudi 13 avril 1700, il arriva, dit Dangeau, un courrier de Rome envoyé par le cardinal d’Estrées, notre ambassadeur, pour rendre compte de ses démêlés avec Erizzo, qui continuoit à Rome contre lui les démêlés commencés en France ; il avoit même fait un écrit très-offensant contre le cardinal d’Estrées dont le Roi approuvoit la conduite (Dangeau).