Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/300

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de ses péchés ; continuez toujours de vivre dans ces nobles sentiments, vous aurez une augmentation de gloire. »

Le prince fit une très-humble révérence à Sa Majesté, en la remerciant de tout son encens ; ce qui fut un sujet de plaisir à toute la compagnie. Pendant le carnaval, toute la Cour travailla à faire diversion à la mélancolie du Roi, qui paroissoit sans remède. La marquise de Maintenon, qui savoit que Sa Majesté aimoit la conversation de la comtesse du Lude[1], tâchoit

  1. Il s’agit de la deuxième femme du duc, Marguerite-Louise de Béthune, veuve du comte de Guiche, qu’il épousa le 6 février 1682. Celle-ci, qui s’étoit mariée pour la première fois le 23 janvier 1658, avoit alors 37 ans. Mais, en 1704 (3 mars), Mme de Coulanges écrivoit à Mme de Grignan : « Nous avons eu la duchesse du Lude quatre jours ici. Cela devient ridicule d’être aussi belle qu’elle l’est ; les années coulent sur elle comme l’eau sur la toile cirée. » — Saint-Simon dément ce qu’on dit ici du plaisir que trouvoit le Roi dans la conversation de la duchesse. Voici d’ailleurs le portrait qu’il trace d’elle :

    « La duchesse du Lude étoit sœur du duc de Sully, fille de la duchesse de Verneuil et petite-fille du chancelier Séguier. Elle avoit épousé en premières noces ce galant comte de Guiche, fils aîné du maréchal de Grammont, qui a fait en son temps tant de bruit dans le monde, et qui fit fort peu de cas d’elle et n’en eut pas d’enfants. Elle étoit encore fort belle (1696) et toujours sage, sans aucun esprit que celui que donne l’usage du grand monde et le désir de plaire à tout le monde, d’avoir des amis, des places, de la considération, et avoir été dame du palais de la Reine : elle eut de tout cela, parce que c’étoit la meilleure femme du monde, riche, et qui, dans tous les temps de sa vie, tint une bonne table et une bonne maison partout, et basse et rampante sous la moindre faveur, et faveur de toutes les sortes. Elle se remaria avec le duc du Lude par inclination réciproque… Elle demeura toujours attachée à la Cour, où sa bonne maison, sa politesse et sa bonté lui acquirent