Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/310

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

quand son amant étoit présent, ce qui le désoloit entièrement, car il ne pouvoit pas dire une parole que la marquise ne l’entendît. Une vie si misérable dura quelque temps, mais comme l’amour est ingénieux, et que ce petit Dieu découvre toujours quelque ruse à ses sujets, le comte de Marsan, ennuyé de son martyre, pria une vieille tante qu’il avoit à Paris, et qui étoit devenue dévote jusqu’à la fureur, et par cette raison grande amie de madame de Maintenon (car elles alloient fort souvent ensemble à Saint-Lazare de Jérusalem[1] faire leurs oraisons) de lui être favorable dans son amour, et de permettre qu’il se trouvât quelquefois chez elle avec mademoiselle de Béthune qu’il aimoit tendrement. Que la sévérité de la marquise de Maintenon lui étoit insupportable ! aussi rendoit-elle toutes ses demoiselles comme des esclaves, qui sont privées de la liberté humaine. Madame de La Roche[2] parut un peu surprise en écoutant la proposition de son neveu. — « Quoi ! dit-elle, Monsieur, vous ne songez pas à ce que vous me dites ? Ne savez-vous pas combien cette dame a de haine et d’horreur pour les rendez-vous, et que, si elle découvroit une fois votre intrigue galante, je serois perdue dans son esprit, et elle maltraiteroit

  1. L’église de Saint-Lazare étoit le seul bâtiment qui fût resté de l’ancien hôpital de Saint-Lazare, après que saint Vincent de Paul en eut pris possession. — Saint-Lazare est devenu une prison de femmes, rue du Faubourg-Saint-Denis.
  2. Le comte de Marsan n’avoit pas de tante qui se nommât Mme de La Roche, ni du côté de son père ni du côté de sa mère.