Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/317

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des maux en idée. — C’est pourtant, Monsieur, dit mademoiselle de Béthune, où les biens et les maux font leur demeure ordinaire. L’idée nous rappelle toujours ce qui nous plaît et ce qui nous déplaît. »

La conversation de nos amants étant finie pour ce jour, le Roi, qui étoit de retour du siége de Saint-Omer[1] avec M. le duc d’Orléans, ces illustres personnes firent une partie de chasse à Saint-Cloud, où toutes les belles de la Cour parurent en équipage de chasseresses et vêtues comme Diane et ses Nymphes, suivies de plusieurs chiens qui couroient dans la forêt les bêtes sauvages au milieu du bois. Sa Majesté et les princes les plus galants attendoient ces charmantes cavalières, déguisés comme le Dieu Pan et comme les Satyres, qui préparoient un superbe festin à cette aimable troupe. Ce beau régal fut accompagné d’un grand nombre d’instruments qui faisoient le plus bel effet du monde.

Le maréchal duc de La Feuillade[2] étoit assis au pied d’un ormeau, qui copioit Orphée en jouant de la flûte douce, qu’il touchoit dans la dernière perfection, et qui sembloit attirer autour de lui tous les oiseaux et tous les animaux de ce bocage. Plusieurs voix toutes charmantes répondoient à cet aimable solitaire.

L’on entendoit un écho fidèle qui répétoit souvent ces tendres paroles, et qui prononçoit comme en soupirant :

  1. Le siége de Saint-Omer, et la prise de la ville par Monsieur, frère du Roi, après 20 jours de tranchée, est du 20 mai 1677. On voit quelle confusion dans les dates.
  2. Le duc de La Feuillade avoit été fait maréchal de France en 1675.