Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/357

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’elle se croyoit la plus fortunée de toutes celles de son village, puisqu’elle avoit le bonheur de plaire à une si illustre personne. Mademoiselle de Bourbon aperçut au langage de cette fille de la différence au jargon ordinaire des bocagères. Elle lui demanda, en la regardant fixement, d’où elle étoit, et si elle n’avoit jamais été dans les villes. La jardinière parut si spirituelle à cette charmante demoiselle, qu’elle entra en soupçon que ce ne fût quelqu’un qui se fût déguisé pour lui parler. Ces pensées la firent retirer plus tôt qu’elle n’auroit fait. Le marquis se voyant seul, et n’ayant pas encore fait de grands progrès dans son amour, s’avisa d’écrire ces vers sur l’écorce des arbres du jardin :

Belle pour qui l’amour se déguise aujourd’hui,
En voyant vos beaux yeux, je demeure ravi.
Plusieurs me charment l’œil, mais une au cœur me tire
Des traits si forts, si doux, que doux est mon martyre.

Comme le marquis achevoit ces tendres paroles, les autres paysannes l’appelèrent pour travailler dans les allées de verdure qui composoient ce beau lieu.



FIN.