Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/79

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le dehors de la place. — Cela seroit bon, dit la Montespan, si on pouvoit s’en tenir là ; mais vous savez, Sire, qu’en amour, on va plus loin qu’on ne pense. »

Après cela, cette malicieuse femme, qui vouloit se réjouir aux dépens de sa rivale, dit que si son mari étoit jaloux, il n’avoit qu’à faire voir sa femme toute nue, et qu’il ne devoit pas craindre qu’il lui arrivât jamais ce qui arriva à cet ancien roi de Lydie. Le Roi, qui ne se pique pas fort de lecture, pria la Montespan de lui raconter cette histoire. — « La voici, dit-elle, Sire, en peu de mots, telle que je l’ai lue dans Hérodote. Candaulès, qui étoit le nom de ce prince, avoit une femme extrêmement belle, et, par une bizarrerie dont on ne sait pas la cause, il la fit voir toute nue à Gigès son favori, qu’il avoit fait cacher dans la chambre de la Reine. — C’étoit sans doute, dit le Roi, pour lui faire voir que son corps étoit aussi beau que son visage. — Il l’étoit en effet, dit la comtesse, et Gigès en devint amoureux ; mais je ne crois pas que le comte doive craindre rien de semblable, de ceux qui verroient sa femme dans le même état. — Je n’aurai jamais cette curiosité,

    d’amour, des menues faveurs qu’on peut obtenir d’une maîtresse dont on ne peut avoir la pleine jouissance, comme baisers, attouchements, etc. » — A la p. 111 du très-curieux roman intitulé Araspe et Simandre (2 vol. très-petit in-8o, 1672), on lit : « tel craint de donner dans une étoffe trop chère, qui, ajustant avec beaucoup de rubans une bien moindre, ne laisse pas de se trouver agréablement vêtu ; c’est ce qu’on appelle la petite oye ; c’est ce que nous donnons quelquefois, et ce que (l’auteur est une femme) nous ne devrions jamais donner. »