Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/78

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repartit le Roi, de ce que vous m’apprenez. Cependant la comtesse a un embonpoint le plus frais et le plus beau du monde, et un teint des plus unis. — Et c’est cela même, dit la Montespan, qui produit cet embonpoint que vous dites ; au moins c’est ce que j’entends dire tous les jours aux médecins, que toutes les mauvaises humeurs se jettent sur ces endroits, et que c’est pour cela que tout le reste du corps est si net et si poli. — Mais cela l’empêcheroit-il d’avoir des amants ? dit alors le Roi. Peuvent-ils deviner une chose qui ne paroît pas du tout ? — Je ne vous ai pas dit, Sire, répliqua la Montespan, que c’étoit cette raison qui éloignoit les amants. Mais j’ai dit à Votre Majesté, si elle y a pris garde, que c’est ce défaut, qui n’est que trop connu d’elle-même, qui lui fait fuir souvent le grand monde et lui fait aimer la retraite. Que lui serviroit après tout, ajouta-t-elle, de faire des amants qu’elle n’oseroit rendre heureux, quelque envie qu’elle en eût ? ou si elle en venoit jusque-là, elle est assurée qu’ils se dégoûteroient d’abord, et qu’elle les perdroit de la manière la plus honteuse pour des personnes de notre sexe. — Elle fera donc bien de s’en tenir, dit le Roi, à ce qu’on appelle la petite oie[1], et de ne laisser prendre à ses amants que

  1. «Petite oye, dit Furetière, est ce qu’on retranche d’une oye pour la faire rôtir, comme les pieds, les bouts d’ailes, le cou, le foye, le gesier… Petite oye se dit figurément des rubans et garnitures qui servent d’ornement à un habit, à un chapeau, etc… La petite oye consiste aux rubans pour garnir l’habit, le chapeau, le nœud d’épée, les bas, les gands, etc. — Petite oye se dit, en matière