Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/94

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seroit connu, elle en vouloit faire un exemple. Un peu après elle considéra l’éclat que cela feroit, les conséquences malignes que quelques-uns en pourroient tirer pour ternir sa réputation, le chagrin, et peut-être les soupçons qu’une affaire si délicate causeroit à son mari, et l’affront que le Roi lui-même en alloit recevoir, quand la chose seroit divulguée ; enfin, plusieurs autres considérations de cette nature la déterminèrent à laisser passer la chose, sans en parler à personne. Cette prudente dame savoit encore, que la réputation de celles de son sexe est extrêmement délicate, que le plus sûr pour elles est de conserver leur honneur et de se défendre contre tous ceux qui l’attaquent, sans en faire tant de bruit ; que l’éclat est ce qui les perd dans l’esprit des gens, lors même qu’elles sont les plus innocentes, et qu’enfin n’ayant rien à se reprocher, elle ne craignoit les reproches de personne, puisque celui qui l’étoit allé trouver au lit s’en étoit retourné comme il étoit venu, et que ceux qui lui avoient prêté la main avoient pu juger, par son prompt retour et par le bruit qu’elle avoit fait, du peu de succès de son entreprise.

La comtesse donc, satisfaite de s’être bien défendue, ne voulut point prôner sa victoire. Qui sait encore si l’Amour ne se mêla pas là-dedans, et si la tendresse qu’elle ne pouvoit s’empêcher d’avoir pour le Roi, ne l’empêcha pas aussi de publier une chose dont elle pourroit se repentir un jour, n’étant pas assurée si elle n’auroit pas enfin pour ce prince des sentiments plus humains ? et, quoiqu’elle n’appuyât