Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/97

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Je t’assure pourtant, dit le Roi, que ce n’est pas à l’Amour que je dois me plaindre de celui qu’on m’a fait répandre cette nuit, et dont je porte les marques. — Mais quoi, Sire, lui dit le duc, n’alliez-vous pas comme ami vous présenter devant cette place ? D’où vient qu’on vous a traité comme un ennemi ? Vous alliez trouver cette femme non pas comme amant, mais comme mari ; est-ce que les rigueurs s’étendent jusqu’à son époux ? Car je ne puis pas comprendre que, l’étant allé trouver la nuit, elle ait pu vous reconnoître, ni vous prendre pour un autre que pour le comte. — Il faut donc te dire ce qui en est, » répartit le Roi, et alors il lui raconta comment il étoit entré dans la chambre de la comtesse ; de quelle manière il s’étoit glissé dans son lit pendant qu’elle dormoit ; comment, après s’être réveillée, elle avoit souffert quelques-unes de ses caresses, le prenant toujours pour son mari. « Enfin, ajouta-t-il, les affaires alloient jusque-là le mieux du monde ; j’allois me rendre maître d’une place qui m’a toujours résisté, lorsqu’une maudite verrue que j’ai aux reins, sur laquelle elle porta fortuitement la main, éventa la mine et me découvrit. — Quoi, si peu de chose, reprit le duc, la fit entrer en soupçon ? — Cela l’obligea à parler, lui dit le Roi, et à me demander depuis quand j’avois cette marque sur le corps ; et, voyant qu’on ne lui répondoit point, elle ne douta plus qu’on ne l’eût trahie. Elle sauta promptement du lit, elle me repoussa, et elle alloit appeler ses gens. Enfin, au lieu qu’avant cela, elle étoit douce comme un mouton, après qu’elle eut touché cette fatale verrue,