Page:Byron - Œuvres complètes, trad Paris, 1830.djvu/167

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ces hommes qui, avant de mourir, jugeaient convenable de tomber ivres morts.

36. Donnez-nous du grogue, criaient-ils, et dans une heure il n’en sera rien de plus. — Non, répondit Juan ; sans doute la mort nous attend vous et moi, mais il faut mourir en hommes, et non pas tomber comme des brutes. » Ainsi il conserva son poste dangereux, et nul ne fut assez hardi pour braver ses menaces. Le très-révérend Pédrillo lui-même ne put obtenir un seul verre de rum.

37. Le bon vieux citoyen, tout éperdu, poussait de hautes et pieuses lamentations, accusait tous ses péchés, et faisait un dernier et irrévocable vœu de réforme. Rien (une fois ce danger passé) ne le déciderait plus à quitter ses occupations académiques et les cloîtres de la studieuse Salamanque, pour suivre, comme Sancho Pança, les courses de Juan.

38. Mais il survint encore une lueur d’espérance. Le jour parut et le vent s’adoucit ; les mâts étaient enlevés, la voie d’eau augmentait ; alentour d’eux des bas-fonds, nulle part un rivage ; et cependant le vaisseau voguait depuis qu’il s’était relevé. Ils disposèrent encore les pompes, et bien qu’auparavant ils regardassent tous leurs efforts comme inutiles, un faible rayon de soleil les remit à l’ouvrage ; les plus forts pompaient, les plus faibles poussaient une voile.

39. Cette voile fut placée sous la quille du vaisseau, et fut d’un effet salutaire pendant un instant.