Page:Cérésole - Les Forces de l’esprit, Emerson.djvu/5

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Confondre tous ces Emerson dans un même sentiment de reconnaissance et d’affection, c’est rendre hommage à celui pour qui l’homme étroitement limité n’était rien et l’âme — en qui et par qui tous les hommes existent — tout.

Le « hasard » fut aimable aussi d’arranger que cette jeune institutrice de Boston souvent rencontrée chez des amis, unissant dans sa personne la grâce sérieuse, l’intelligence et la beauté typiques des filles de la Nouvelle-Angleterre, s’appelât, précisément comme la première femme d’Emerson, Miss Tucker.

Des vaines biographies

Emerson n’encourage pas les biographies détaillées : « Etes-vous, en somme, écrit-il, l’ami des boutons d’habit de votre ami ou l’ami de ses pensées ? Une personne de caractère noble consentira que son ami lui reste étranger en cent détails. Pourquoi vouloir absolument établir avec lui des relations personnelles étroites ? Pourquoi le visiter dans sa maison et vouloir absolument faire la connaissance de sa mère, de son frère ou de ses sœurs ? Tout cela touche-t-il vraiment à l’essence des liens sacrés qui nous unissent ? Quittez donc cette manie de le toucher et de l’envelopper de votre sentimentalisme étouffant ! »

Et ailleurs, sur une note plus sarcastique encore : « De quelle honte ne me couvrirais-je pas si j’allais compter maintenant combien de paires de bas de soie tu possèdes, combien de telle espèce et combien de telle autre — couleur orange — ou si j’allais faire un inventaire de tes chemises, les unes pour les grandes occasions et les autres pour tous les jours ! »

Ralph-Waldo Emerson est né à Boston (Etats-Unis) en 1803. A l’âge de huit ans, il perdit son père qui était pasteur et dut, comme ses quatre frères, lutter durement pour trouver les moyens de faire ses études secondaires et universitaires. Il étudia la littérature, la philosophie et la théologie à l’Université d’Harward, devint pasteur d’une église unitairienne très libérale à Boston et s’en sépara quelques années plus tard en toute amitié, parce que ses idées avaient évolué et qu’il ne lui paraissait plus possible de participer en toute sincérité à la célébration de la Sainte-Cène, Un peu plus tard, il prononça, à la cérémonie solennelle qui clôt les études de la classe supérieure de la Faculté de théologie d’Harward, un discours célèbre dans lequel il exposait sa manière de comprendre et de sentir le christianisme, A la suite de ce discours, ses relations avec l’Université d’Harward furent rompues pendant trente ans, Au bout de ce temps, il y fut rappelé et nommé membre du Conseil de surveillance. L’œuvre de sa vie consiste essentiellement dans une série d’études sur des questions de littérature et de philosophie, mais surtout de morale et de religion, ces quatre domaines ne se séparant guère chez lui. Il fit ces conférences dans différentes villes d’Amérique et d’Angleterre et les publia plus tard. Ces études et ces discours, profondément reli¬ 3